Le sceau des Consuls

Cette influence des familles nobles paraît d'ailleurs assez relative et fortement compensée par les pouvoirs délégués aux consuls de la Communauté. Si les attributions de ceux-ci avaient été, évidemment, conçues en vue d'une administration matérielle du territoire de leur ressort, il est arrivé que les consuls soient sollicités à l'occasion d'évènements politiques auxquels ils étaient totalement étrangers.

Ainsi, en 1303, les communautés de la Sénéchaussée de Rouergue, sont priées par le roi : Philippe le Bel, d'appuyer l'appel contre le Pape Boniface VIII, lors d'un futur concile.Pour illustrer le caractère exceptionnel de cette demande, je relève dans l'ouvrage du Dr Barthès ( 42 ), les termes d'une prétendue réponse du roi à la bulle papale " Ausculta fili " :
" Philippe, par la grâce de Dieu, roi de France, à Boniface, qui se dit pape, peu ou point de salut. Que ta grande fatuité sache que nous sommes résolus à maintenir dans leurs possessions, ceux que nous y avons mis ; ceux qui croiront autrement sont des fous et des insensés ". Paroles peu dignes du petit-fils de St Louis.

C'est avec la réponse faite à l'appel du roi qu'a été conservé intact le sceau des consuls de Brusque ( 43 ) il se présente, sous forme d'une navette de 22x39 mm, en cire verte, appliquée sur des rubans de chanvre vert, portant au centre un écu losangé surmonté d'une fleur de lis entouré des mentions : COSSOLS - BRUSCA.

Une période de transition dans la vie de la Communauté

Pendant les quelques années qui ont suivi son incorporation au Royaume, le sort de notre Communauté est incertain et mal connu. Les consuls se sont-ils arrogé des droits exorbitants ? ou bien, se sont-ils trouvés devant une vacance féodale ? Toujours est-il qu'il faut attendre l'année 1316 pour voir un seigneur languedocien : Bérenger IV de Clermont-Lodève (l'actuel Clermont-l'Hérault) rendre hommage au roi Philippe V, pour les châteaux de Brusque et de Murasson ( 44 ). Par son mariage avec Helipse de Boussagues, dame de St Gervais et vicomtesse de Nébouzan, il avait également pouvoir sur ces deux seigneuries voisines de Brusque ( 45 ).

Un acte du Trésor des Chartes ( 46 ) précise qu'à la faveur de cette inféodation, le Roi annule l'ancienne clause sur la constitution du consulat, mais qu'il confirme les droits de la communauté sur les bois de Manevabla et les pâturages, ainsi que la concession du Consulat, mais réserve aux seigneurs la haute et moyenne justice, le droit de chasse et la perception de la censive.
Une charge de garde forestier est créée, pour limiter les dégradations. La délimitation des territoires respectifs du ressort du château de Brusque et du lieu de Mélagues est décidée, tout en les laissant fusionnés dans une même communauté. Les représentants du Brusquès, cités à cette occasion (1309) sont :

La Seigneurie de Brusque, fief des Guilhem de Clermont- Lodève

Si l'extrait du Trésor des Chartes, cité plus haut, ne nous éclaire pas sur les circonstances et la date de l'inféodation, par le roi, du château de Brusque et de son territoire à Bérenger- Guilhem, il apporte la preuve de l'entrée, vers le début du XIVème siècle, de cette seigneurie dans l'apanage de la famille de Clermont-Lodève, déjà très fortement possessionnée en Languedoc et à Murasson ( 47 ).

Le Brusquès devait rester dans sa descendance jusqu'à la Révolution, soit pendant près de cinq siècles, après plusieurs transmissions par les femmes ( voir annexe 3).

Création de l'Evêché de Vabres - 1318

Sous le pontificat de Jean XXII (Jacques Duèze, né à Cahors), qui choisit Avignon pour résidence, fut décidé le dédoublement de certains évêchés, jugés trop étendus. Ce fut le cas pour l'évêché de Rodez, amputé de toutes les paroisses dont le siège était situé sur la rive gauche du Tarn et de la Dourbie.

Le nouvel évêché fut établi dans les bâtiments de l'ancienne abbaye bénédictine de Vabres, dont le père-abbé : Pierre d'Olargues devint le premier évêque.
Parmi les 128 paroisses et 24 annexes ( 48 ), ainsi transférées, figuraient :

  1. La Cure de St Laurent de Fayet ;
  2. La Cure de St Jacques de Brusque
  3. Le Prieuré-cure de St Pierre des Cats et son annexe St Benoit d'Arnac ;
  4. Le Prieuré-cure de St Martin de Mélagues et son annexe St Maurice de Rieusec ;
  5. Le Prieuré régulier de Notre-Dame de Tauriac , rattaché à l'abbaye de Joncels ;
  6. Le Prieuré séculier de Notre-Dame de La Roque-Papalhonac ;

Le pouillé de Vabres de 1318 - aujourd'hui introuvable - était manifestement muet sur les églises primitives du Brusquès ou anciens lieux de culte, soit que les unes ou les autres aient totalement disparu, se soient trouvés en ruines, aient été désaffectés ou tout simplement n'aient conservé aucun lien avec le nouvel évêché.

Le fief d'Arnac

La tradition orale, recueillie dans le canton tarnais de Murat, fait d'Arnac une dépendance du château de Canac, à peine éloigné de 2 km à vol d'oiseau. Mais, jusqu'à présent, aucune date, pièce d'archives ou alliance ne permet de confirmer et de situer cette inféodation.
Par contre, en 1326, Aymeric du Pont, fils de Bérenger du Pont, co-seigneur de Camarès est dit co-seigneur d'Arnac, cette co-seigneurie représentant la dot de sa femme Elys de St Maurice ( 49 ).

Concession d'une foire à Brusque

En Juillet 1328, le Roi Philippe VI concède aux habitants de Brusque le droit de tenir une foire au mois d'octobre, à la fête de St François et les deux jours suivants .
Il soulignait ainsi que la faculté de créer des foires, dépendant autrefois du pouvoir du comte, relevait dorénavant de l'autorité royale ( 50 ).

La bailie de Roquecezière

En 1341, la sénéchaussée de Rouergue était divisée en 16 bailies et notre communauté faisait partie de la bailie de Roquecezière, comprenant les paroisses des actuels cantons de St Sernin, Belmont, partie de celui de Camarès, Cornus, St Affrique, St Rome de Tarn ( 51 ).

Dans un document conservé à la Bibliothèque Nationale (fonds latin 185), se trouve, en particulier, l'évaluation de la capacité contributive de chaque paroisse, exprimée en nombre de feux.

138 Castri de Brusca cum ipso castro 215
139 De Tauriaco 56
140 De Molatgiis 54
141 De Faieto 48
 
187 S. Petri des Cas 38
Soit pour toute la communauté
( la paroisse de La Roque n'est pas mentionnée !)
411 feux

En évaluant la composition moyenne d'un feu à 5 personnes, la communauté des exempts de tailhe : nobles, prètres, clercs et indigents.

La mine d'argent de Ladreg del Vivier

Soixante quatorze ans après la mise en exploitation de Prat Mansel (se reporter au paragraphe correspondant), une autre mine d'argent fut découverte, en 1343, au lieu dit Ladreg del Vivier, toujours sur le territoire de Tauriac. Cette prospection donna lieu à un conflit entre Déodat Guillermi de Clermont, le seigneur de Brusque, représenté par Brenguier de Promilhac, qualifié de damoiseau et procureur du seigneur, et les deux frères Boiac, que nous situons, grâce à l'ouvrage de l'abbé Bic, co-seigneurs de Murasson.
Au cours de cette procédure, sont cités Jean et Guillaume Bernardi de Promilhac de Tauriac - sans doute vassaux pour Tauriac - ( 52 ).

 

 

 

Notes bibliographiques
( 42 ) Dr Joseph Barthès, St-Pons de Thomières et son abbaye, t. 2, p. 561
( 43 ) Martin de Framond, d'après AN J 479 num 15
( 44 ) Devic et Vaissette, Histoire générale du Languedoc, 3e édition, tome IX, p. 362
( 45 ) E. Martin, Chronique et généalogie des Guilhem
( 46 ) Trésor des Chartes - p. 77 art 47 a
( 47 ) Devic et Vaissette, Histoire générale du Languedoc, 3e édition, tome IX, p. 362
( 48 ) H. Affre, Dictionnaire des institutions, moeurs et coutumes du Rouergue, p. 167
( 49 ) AD Aveyron, Inventaire série G p. 41
( 50 ) Bibliothèque Nationale, JJ65A folio 136 num 240/6
( 51 ) A. Molinier, La sénéchaussée de Rouergue, p. 6
( 52 ) Chanoine Verlaguet, Cartulaire de Silvanès, p. 463, note b